“Are you recording ?”
Dans une Chine opaque et oppressante, traqués par ses millions de caméras, Yan, Taro, Toddy, Sam et les autres font comme ils peuvent et profitent d’un répit. L’homosexualité n’y est plus considérée comme une maladie et est désormais légale. En 2019, les homosexuels ne seraient pas le principal ennemi. Le discours du régime, subtil, ne s’oppose pas ouvertement aux droits de la communauté LGBT.
Alors la nouvelle génération pointe son nez, en quête de liberté. En fond : la nuit. La nuit, ses bars interlopes et ses ténèbres propices au camouflage, aux confidences et à l’oubli. On ose y croire, on s’efforce d’y croire, on voudrait bien « vivre normalement ». L’anonymat est de rigueur, on s’y plonge, l’étau semble se desserrer. On s’enivre, on s’offre, on s’abandonne.
Puis on fait un pas en arrière, une grille, réelle ou imaginaire, s’est subitement baissée. La réalité rattrape, et remplit les vies de craintes et contradictions. Certains s’échappent à Taïwan, pour la gay pride, là où on peut même se marier. Les plus téméraires enfileront un personnage, à leurs risques et périls. Ils tâcheront d’assumer, en rêvant malgré tout d’ailleurs. Mais l’on se fait peu d’illusions.
Car hélas, le régime chinois ne cesse de se durcir. Le centre LGBT de Pékin ferme ses portes en 2023 pour « force majeure », les thérapies de conversion se multiplient ; la censure continue d’opérer.
Alors on se tait, on s’exécute, ou on s’exile.
Texte et photos : François Silvestre de Sacy















